Hélène de Montgeroult (1764-1836)
Madame Hélène de Montgeroult,
par Richard Cosway
Qui est Hélène de Montgeroult ?
Née à Lyon en 1764, Hélène de Montgeroult a suscité les plus vifs éloges de ses contemporains, tant comme pianofortiste, que comme compositrice et pédagogue.
La pianiste
« Toute la direction du talent de Madame de Montgeroult était portée vers l’expression et l’art de chanter »
Baron Louis de Trémont (1779-1852)
Tous ceux qui ont eu le privilège de l’entendre sont unanimes: Hélène de Montgeroult était une immense pianiste: brillante improvisatrice et virtuose, elle se distinguait tout particulièrement par son toucher et l’expression de son jeu. Le statut social d’Hélène de Montgeroult, marquise, ne lui permettait pas de se produire dans des salles de concert. Par ailleurs, elle a toujours préféré jouer pour un public choisi de véritables amoureux de la musique plutôt que dans des salons où l’on jouait aux cartes et bavardait pendant l’exécution de « divertissements » musicaux. C’est pourquoi, dès qu’elle s’est mise à la composition, Hélène de Montgeroult n’a plus joué que chez elle.
La compositrice
« Il y a du Schubert, façon Impromptu dans l’Étude no 62 ; du Chopin, façon opus 10 no12, dans l’Étude no107 ; et même du Brahms, façon Intermezzi, dans l’Étude no104. »
Jérôme Bastianelli, Critique des Études d’Hélène de Montgeroult, Diapason, 2007
L’oeuvre d’Hélène de Montgeroult comporte des Sonates, des Fantaisies, des Nocturnes et surtout un « Cours Complet pour l’enseignement du forte piano, conduisant progressivement des premiers éléments aux plus grandes difficultés » On trouve dans ce cours 972 exercices et 114 études qui s’apparentent plus à des « moments musicaux » ou des « impromptus » qu’aux exercices arides qui avaient cours à l’époque.
La pédagogue
« Si bien chanter est la plus grande difficulté sur tous les instruments, on pourrait presque désespérer de la vaincre sur le Forte-Piano qui, privé de la faculté de soutenir les sons a tout donné lorsqu’il a été touché; mais le sentiment rend ingénieux, et le besoin d’exprimer ce que l’on éprouve peut créer des ressources qui échappent au mécanicien. »
Hélène de Mongeroult , Observations sur l’Étude n°110.
Madame de Montgeroult a été la première femme à enseigner au Conservatoire National de Paris. Elle y a été engagée dès sa création en 1795, à titre « professeur de première classe, hommes ». Trois ans plus tard, elle donne sa démission, pour raison de santé. Elle enseigna la musique de Jean Sébastien Bach et de Händel à ses élèves. Son cours fait montre d’un grand souci pédagogique: elle fait précéder chaque pièce de quelques mots pour signaler les écueils à éviter et suggérer des méthodes de travail.
Repères chronologiques
Hélène de Nervo
1764 Naissance à Lyon d’Hélène de Nervo
1766 Naissance de son frère Christophe-Olympe à Paris où la famille semble s’être installée
1776 Cours avec Hüllmandel, musicien alsacien qui aurait étudié avec Carl Philip Emmanuel Bach
1784 Mariage avec André-Marie-Gautier marquis de Montgeroult
Marquise de Montgeroult
1785 « Premier concerto pour piano », adapté d’un concerto de Viotti dont elle vient de faire connaissance
1786 Leçons avec Dussek qui lui dédiera Trois sonates pour le Clavecin ou le Forte-Piano, dont deux avec Violon obligé et la troisième sans Accompagnement op.5
1788-1789 Commence à écrire son « Cours complet »
Sous la Révolution
1789 14 juillet, prise de la Bastille. Première vague d’émigration
1792 Juillet à décembre: séjour en Angleterre après la vente du Château de Montgeroult
1793 Voyage en Allemagne autour de Pâques. À l’improviste, elle remplace son hôte, organiste atteint d’une attaque de goutte, lors de l’office du jour de Pâques. Départ du couple Montgeroult pour Naples avec une délégation diplomatique secrète. Arrestation par les Autrichiens à Novale (Italie). Les délégués sont conduits à Mantoue et incarcérés. Hélène est relâchée peu après mais son mari reste en prison où il meurt le 2 septembre. Perquisition au domicile des Montgeroult. Retour à Paris en octobre
1794 Hélène de Montgeroult, incarcérée à la Conciergerie, sauve sa tête, raconte-t-on, en jouant et improvisant brillamment sur le thème de la Marseillaise
Professeur au Conservatoire de Paris
1795 Professeur « de première classe » au Conservatoire de Paris qui vient d’être créé. Chargée de la classe de piano Hommes. Première et seule femme professeur d’instrument à cette époque au Conservatoire. Naissance de son fils Aimé-Charles-Horace. Publication de Trois sonates op.1
1796 Voyage à Berlin pour éditer sa Sonate en fa mineur
1797 Mariage avec Charles-Antoine-Hyacinthe His qui donne son nom au fils d’Hélène. Aimé-Charles-Horace His de la Salle deviendra un éminent collectionneur d’art, en particulier de dessins qu’il léguera au Louvre. Sous le titre « Officier et gentleman au XIXème siècle: la collection His de la Salle au musée du Louvre », une exposition a été consacrée à sa donation entre fin 2019 et février 2020 au musée du Louvre.
1798 Démission du Conservatoire (il faudra attendre 50 ans et la nomination de Louise Farrenc pour avoir à nouveau une femme professeur de piano au Conservatoire de Paris)
Compositrice
1800 Trois sonates op.2. Cours de contrepoint avec Reicha
Sous le Premier Empire
1802 Divorce d’avec Charles-Antoine His
1804 Pièces pour piano op.3
1804-1807 Trois Fantaisies op.4 et Trois sonates op.5
1807 Six Nocturnes op.6
1810 achèvement du Cours complet pour l’enseignement du Forté-Piano conduisant progressivement des premiers éléments aux plus grandes difficultés, en trois parties.
1812 le Cours complet est encore à la gravure
Sous la Restauration
1818 Séjours en Angleterre
1820 Édition du Cours complet chez Janet&Cotelle. Mariage avec le comte Dunod de Charnage
1826 Mort du comte Dunod de Charnage
Italie
1834 départ pour l’Italie en compagnie de son fils
1836 Mort à Florence où elle est enterrée (Santa Croce)
Jérôme Dorival, musicien et historien, a consacré une étude très fouillée à cette artiste, parue en 2007 aux éditions Symétrie sous le titre « Hélène de Montgeroult, la Marquise et la Marseillaise »
